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Le suicide est depuis longtemps un grave problème de santé publique. C’est pourquoi nous devons parler du suicide et continuer d’en parler. Ce sujet reste tabou pour beaucoup alors que les tentatives de suicide sont significativement plus fréquentes que l’on pense…
- Quelques précisions -
On associe souvent le suicide à un événement précis, alors qu’un seul événement ne suffit pas à expliquer ce geste. Toutefois, cet événement peut être la goutte d’eau qui fait déborder le vase, il s’agit de l’ultime élément qui vient clore une spirale négative. Le geste suicidaire n'est pas spontané, il s'inscrit dans un processus où les essais répétés de régler les difficultés sont de moins en moins efficaces. Le désespoir s'installe et la personne en vient à croire que le suicide est le seul moyen de mettre un terme à la souffrance.
Parler de soi et de nos difficultés s’avère souvent difficile. Beaucoup de personnes préfèrent se taire, en espérant sortir du flou par leurs propres moyens ou en espérant des jours meilleurs à venir. Le repli sur soi et l’isolement peuvent aggraver une sensation d’échec, mais aussi augmenter la perte de confiance et d’estime de soi. Malheureusement, les signes démontrant que ce chemin est empreinté sont très souvent cachés et par conséquent quasi invisibles pour les autres. Toutefois, dans certains cas, une série d’indices, plus ou moins subtiles, peuvent attirer l’attention de l’entourage et lui rendre possible de faire part de son inquiétude afin d’initier un dialogue. Cependant, le processus suicidaire est d'une durée différente selon les personnes, ainsi chez ceux/celles de nature impulsive, il peut être réduit à quelques jours voire même quelques heures.
Quand les idées suicidaires s’installent, les comportements et discours, qui peuvent sembler banals, sont à décoder :
La personne suicidaire veut mettre un terme à sa souffrance et non à sa vie. En fait, la personne suicidaire est ambivalente quant à son désir de vivre et son impossibilité à continuer de souffrir. Comprendre cette ambivalence et s'en servir pour trouver une solution porteuse d'espoir est une façon d'intervenir :
Il se peut qu'une personne suicidaire semble momentanément soulagée et paraisse mieux, mais il faut être vigilant, car cela ne signifie pas que le danger est passé. Au contraire, une bonne humeur soudaine peut indiquer une urgence élevée :
- Les suites d'une tentative de suicide -
La plupart des tentatives de suicide ne sont pas fatales, mais cela ne signifie pas que tout est résolu : les problèmes qui existaient avant la tentative, sont toujours présents. Comprendre les conséquences émotionnelles d'une tentative, et être conscient que cela puisse se répéter, sont nécessaires pour aider les survivants à se rétablir et à se protéger contre de futurs dommages.
Les émotions qui suivent une tentative de suicide peuvent varier considérablement :
Bien que certaines preuves suggèrent que ces sentiments/croyances se dissiperont, pour la majorité des survivants, ils doivent être pris en compte, car l’individu est toujours à risque. C’est pour cela que toute personne ayant attenté à sa vie, ainsi que son entourage, doivent impérativement consulter un professionnel de la santé mentale.
- Obtenir de l'aide après une tentative de suicide -
Les pensées suicidaires persistantes sont une réalité pour certains : les pensées peuvent être continues, ou elles peuvent s'estomper temporairement et revenir. Quel que soit le moment où elles surviennent, il est impératif de demander de l'aide dès que possible, soit en appelant un numéro d'urgence local ou un centre de prévention du suicide.
Il n'y a aucune honte à avoir, la plupart des survivants mènent une vie bien remplie et épanouie. Après une tentative de suicide, il est normal de ressentir de nombreuses émotions fortes et contradictoires, de s'isoler délibérément ou d'essayer de cacher ce qui s'est passé. Mais le lien social est particulièrement important et peut être puissamment curatif, car il peut permettre d’identifier certains problèmes, de donner du sens et/ou un but à la vie. Ainsi rejoindre un groupe de soutien peut être utile.
Au-delà de cela, il ne faut rien surestimer, il n’y a pas d’acquisition soudaine de superpouvoirs pour affronter la vie, seul un professionnel de la santé mentale peut guider, aider à renforcer et donner les armes qui manquaient pour affronter le passé, le présent et le futur, que le besoin se fasse sentir ou pas.
- Soutenir quelqu'un après une tentative de suicide -
Lorsqu'un être cher tente de se suicider, il est normal d'être confus, effrayés ou en colère. Il est difficile de savoir quoi dire ou quoi faire à la suite d’une tentative de suicide, mais il ne faut pas chercher à rassurer ou à anticiper/cadenasser les gestes et les paroles, il faut juste être présent. Si une opportunité de parler de la tentative de suicide se présente, il faudra faire un effort pour écouter avec empathie et sans jugement.
À la suite d'une tentative de suicide, il est courant que les gens tournent autour du pot ou agissent comme si cela n’était jamais arrivé, ce qui peut aggraver la situation tant pour le survivant que pour son entourage (surtout sur le long terme).
- Survivre à la mort -
Suivant la proximité et l’attachement au défunt, l’entourage vivra avec plus ou moins d’intensité le processus de deuil. Après le temps du choc de la nouvelle, les refus « d’y croire » et le temps des funérailles, il se peut que les personnes proches soient tourmentées par des questions concernant les raisons de ce suicide ainsi que par un sentiment de culpabilité. Ils pourront éprouver des sentiments intenses de peine, de tristesse, d’insécurité, de révolte, de désarroi, de honte, de peur… C’est ainsi qu’ils seront susceptibles de s’égarer dans le temps : le temps où « l’autre » était vivant. Le sommeil, l’appétit, le quotidien risquent d’être perturbés. Ils auront le sentiment d’être des individus « à part » et se sentiront souvent incompris. Au cours de cette épreuve et durant de longs mois, ils auront besoin, à leur tour, de l’écoute et du soutien de leur entourage, et d’une aide professionnelle.
Conclusions
Le suicide est un sujet dérangeant dont on parle difficilement. Pourtant, c'est en parlant du suicide que l'on peut le démystifier et parvenir à aider une personne en détresse. Demander directement si une personne songe au suicide, ce n'est pas lui suggérer l'idée, mais lui ouvrir la possibilité d’exprimer sa souffrance.
Nous devons éviter de sous-estimer le sujet ou de louanger quelqu'un qui s'est suicidé en qualifiant son geste de courageux ou à l’inverse de l’accabler en le traitant de lâche. Il faut aussi faire attention à la médiatisation entourant le suicide, car trop souvent romancé elle pourrait créer un effet de fascination.
Il est essentiel de considérer que les personnes ayant déjà eues des idées suicidaires, vivant un deuil à la suite d'un suicide ou étant des proches d'une personne suicidaire, peuvent exprimer davantage le besoin d'aide, d’où l’importance à lever le voile sur le sujet, et ne pas hésiter à faire appel à un professionnel.
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